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           Pour les Français, la Grande Guerre, qui deviendra malheureusement la Première Guerre Mondiale, a débuté le 2 août 1914 par la mobilisation générale décrétée la veille. Celle-ci concernait tous les hommes en âge de porter les armes ou classés dans la réserve, c'est à dire ceux qui étaient nés entre 1868 et 1898. Ont été concernés d'emblée les hommes qui effectuaient leur service militaire dont la durée avait été à nouveau portée à 3 ans en 1913. Malheureusement, les pertes humaines ont été considérables au cours des premiers mois de la guerre face à une armée allemande supérieurement armée, en particulier en artillerie lourde et légère. C'est ainsi que 40 000 hommes furent tués entre les 20 et 25 août, dont 27 000 dans la journée du 22 août qui détient le triste record de la journée la plus meurtrière de toutes les guerres de l'histoire de France. A la fin du conflit, 8 500 000 hommes auront été mobilisés, certains pour combattre et d'autres, en particulier les plus âgés, pour assurer la continuité de fonctionnement des entreprises et services concernés par la guerre ou des exploitations agricoles.

 

            Sur ces 8 500 000 hommes d'une population de 39 600 000 habitants que comptait la France, 1 400 000 seront tués, dont 27 % des 18-27 ans, et 3 600 000 reviendront avec des séquelles de blessure plus ou moins invalidantes. A titre de comparaison, l'Allemagne, qui à cette époque, comptait plus de 60 000 000 d'habitants a mobilisé 13 250 000 hommes et en a perdu 1 950 000 tandis que 4 200 000 étaient blessés.

 

            Bien qu'approximatifs, ces chiffres rendent bien compte de l'effroyable impact qu'a eu cette guerre sur les populations des deux pays mais reflètent mal celui qu'elle a eu sur les habitants.

 

            Le propos de ce mémoire est d'étudier cet impact d'une façon plus concrète et à une échelle humaine en effectuant un « zoom » sur le village de Pinols, chef-lieu de canton de la Haute-Loire. Il repose sur l'étude de diverses sources : en premier lieu les registres de l'état-civil de la commune mais aussi ceux des communes d'origine de ceux de ses habitants qui étaient venus s'y installer ou de communes où des Pinolais d'origine étaient allés s'installer, les registres des matricules militaires (Archives Départementales de la Haute-Loire, du Cantal, de la Loire, de la Creuse, de la Nièvre et de la Seine), le registre « Mémoire des Hommes » du Ministère de la Défense consacré aux morts de la guerre 14-18 sans oublier, bien sûr, le monument aux morts de Pinols et la stèle installée dans l'église ainsi que les monuments aux morts de diverses communes, tous ayant fait l'objet de relevés sur le site Généaweb.

LA DÉMOGRAPHIE

 

            Selon les données des recensements, la population générale de Pinols était de 845 habitants en 1856, 877 en 1872 puis 904 en 1876. Elle n'a ensuite cessé de décroitre lentement et, malgré un léger rebond en 1901 (816 habitants) elle n'était plus que de 789 habitants en 1911.

 

            Entre 1868 et 1898, sur une période de 31 années, 799 enfants sont nés à Pinols soit 26/an en moyenne avec des extrêmes de 18 (1894, 1895) et de 42 (1880). Sur ces 799 enfants, 406, soit un peu plus de la moitié, étaient des garçons qui étaient appelés à passer devant le conseil de révision l'année de leurs 20 ans. Toutefois, seuls 266 d'entre eux, soit environ les 2/3, atteindront cet âge, la majeure partie des décès étant survenus chez les nourrissons.

 

 

 

            Par ailleurs, les recherches entreprises n'ont pas permis de retrouver la trace de 28 de ces garçons qui ont quitté Pinols à une date indéterminée et qui, soit, restés dans le département, sont décédés avant le Conseil de Révision soit ont quitté le département.

 

CONSCRIPTION

 

A la fin du 19ème siècle, le Conseil de Révision représente une étape primordiale dans la vie d'un jeune homme, un véritable rituel de passage à l'âge adulte. Chaque début d'année, les jeunes gens ayant eu 20 ans au cours de l'année précédente sont convoqués au chef-lieu de canton pour passer devant une commission chargée d'évaluer leur aptitude au service armé qui débute au mois d'octobre suivant pour une durée de 3 ans jusqu'en 1904 puis de 2 ans à partir de 1905 avant de revenir à 3 ans en 1913. Cette durée peut être réduite, essentiellement pour des motifs familiaux. C'est ainsi que le service du cadet d'une famille est réduit lorsque son aîné est sous les drapeaux. De même « bénéficient » d'un service réduit les soutiens de famille (fils unique de veuve, aîné de famille nombreuse...).

 

Les conscrits peuvent être « propres au service », ajournés et, dans ce cas, faire l'objet d'une réévaluation d'année en année ou enfin exemptés quand la cause de leur inaptitude à un caractère définitif.

 

Sur les 266 garçons nés à Pinols et ayant atteint l'âge de 20 ans, 238 sont passés devant le conseil de révision. 186, soit environ 4 sur 5, ont été déclarés propres au service soit d'emblée, soit après un ajournement d'un à deux ans. Les autres ont été exemptés pour des motifs divers parmi lesquels on retrouve fréquemment la faiblesse et/ou la taille insuffisante. C'est ainsi que 5 d'entre eux n'atteignaient pas la taille minimale requise de 1m 53, la taille moyenne étant de 1m 63.

 

            Pour la plupart, sinon la totalité, de ceux qui font leur service militaire, c'est l'occasion de découvrir d'autres régions, voire d'autres pays puisque certains vont se retrouver dans une des colonies françaises d'Afrique. Pour les appelés des classes 1911 à 1918, y compris pour les ajournés temporaires, la réalité sera plus tragique. Ceux qui étaient en cours de service à la date de la mobilisation générale (Classes 1911, 1912, 1913) enchaineront directement avec celle-ci et paieront un lourd tribut à la guerre, très meurtrière au cours de ses premiers mois.

 

MOBILISATION

 

            La mobilisation générale a été décrétée le 1er août 1914 et est entrée en vigueur le lendemain.

 

            Dès ce premier jour, 30 natifs de Pinols étaient mobilisés et 79 le seront au cours de la première semaine. Les premiers mobilisés ont bien sûr été ceux qui se trouvaient à ce moment sous les drapeaux et qui se sont tout de suite retrouvés au combat. Parmi les autres on retrouve beaucoup d'hommes qui, de par leur profession, feront l'objet pendant toute la durée de leur mobilisation d'une « affectation spéciale » de façon à ce que soit assurée la continuité des services nécessaires à la bonne marche du pays  (poste, chemins de fer).

 

            La mobilisation se poursuit à un rythme d'autant plus soutenu que les pertes humaines sont élevées au début de la guerre et à la fin de l'année 1914, 127 hommes auront été mobilisés.

 

            41 le sont au cours de l'année 1915, 13 en 1916. L'âge des mobilisés augmente et une bonne partie d'entre eux, parmi les plus âgés, est détachée dans des établissements agricoles ou industriels pour faire face aux besoins du pays.

 

            Au final ce sont 189 hommes nés à Pinols entre 1868 et 1898 qui auront été mobilisés pour ce conflit.

BILAN HUMAIN

 

            Sur les 189 mobilisés, tous n'ont pas combattu. Néanmoins, comme dans tout le pays, la Grande Guerre a été particulièrement meurtrière pour les Pinolais d'origine puisque 28 hommes sont morts dont le plus jeune avait 20 ans, le plus âgé 44 ans et 19 moins de 30 ans.

 

            Ils ont laissé 8 veuves et 10 orphelins dont 6 ont été reconnus pupilles de la Nation. Ce nombre est un minimum dans la mesure où certaines recherches n'ont pas été possibles en l'absence de numérisation des registres de l'état civil au delà de 1901 dans certains départements.

 

            Par ailleurs 37 d'entre eux ont été blessés ou gazés plus ou moins gravement.

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